mardi 22 novembre 2016

Distille



Distille
  Le vêtement fremen qui leur permettait de survivre dans le désert en refroidissant le porteur et en prévenant la perte d’eau. Ces justaucorps lisses, gris, étaient la deuxième peau des fremen – et de tous ceux qui avaient du bon sens et qui avaient eu l’occasion de s’aventurer dans le désert Arrakeen. Un homme non protégé, sans accès à un approvisionnement en eau incroyablement grand, ne pouvait pas vivre plus d’une journée sur le sable ; mais un homme qui portait un distille de fabrication fremen, pouvait réduire la perte d’eau à moins de quinze millilitres par jours. Les versions moins efficaces de combinaisons, produites dans les usines de villages par les péons arrakeen, étaient considérablement inférieures et n’offraient pas un tel niveau de protection.



  Les distilles étaient une invention de nécessité, mise au point après que les nomades zensunni aient été amenés sur Arrakis. Pas même sur Ishia, un arrêt plus tôt dans la migration des zensunni, la conservation de l’eau n’avait été aussi essentielle, empêchant toute trace d’humidité corporelle de s’échapper, ce qui serait fatal. Les pratiques qui avaient permis la vie sur cette planète aride (bien que beaucoup moins aride qu’Arrakis) était tout simplement trop inefficaces pour le nouvel environnement, et le distille fut une des premières adaptations qui furent faites.
  Le tissu lui-même faisait des combinaisons efficaces. Son invention était un hommage à la capacité des fremen à voir une « utilisation multiple » de la technologie. Les zensunni avaient été utilisé comme travailleurs dans de nombreux types de domaines différents, au cours de leurs générations d’errance et avaient conservé la connaissance des divers types d’appareils et de machines qu’ils avaient exploitée. Une telle machine, un séparateur cryogénique, avait été utilisé sur un certain nombre de mondes pour aspirer l’oxygène et d’autres gaz de l’atmosphère d’une planète. Les fremen se souvinrent de la technique et l’appliquèrent à la fabrication du tissu des distilles.
  Le tissu était un micro-sandwich sous sa forme achevée, il était produit en couches. La couche la plus profonde était composée d’une membrane poreuse permettant le libre passage de la transpiration, l’humidité exhalée et autres sécrétions corporelles ; c’était également une isolation efficace, protégeant le porteur de la combinaison du refroidissement par évaporation.
  Les deux couches suivantes accomplissaient la séparation de l’eau réutilisable. Un système complexe de tubes fins imprégnait le tissu. Ils étaient équipés de clapets anti-retour à divers endroits pour garder le contenu du système dans des directions inverses. Les tubes contenaient de l’air au début du cycle de la combinaison ; la pression de l’air s’accumulait par l’action de pompage de la respiration de l’utilisateur et par les pompes à talons situées sur les semelles de la combinaison. A une pression réglée (qui variait selon les conditions atmosphériques dans lesquelles était porté le costume), l’air sortait dans une poche de la tenue à l’intérieur de la combinaison.
  Cet air soudain relâché était refroidi par effet joule-Thompson, et l’air refroidi passait  dans un système et traversait à nouveau le costume, provoquant une baisse de température des couches dans lesquelles il passait. L’accumulation, la libération, le cycle renvoyait et continuait jusqu’à ce que la température chute suffisamment pour liquéfier l’ammoniaque produit dans les poches de cuisses du costume, qui filtrait l’urine de l’utilisateur. Une fois que l’ammoniaque était liquéfiée, l’air était automatiquement maintenu dans la poche du capuchon et pouvait être pompé par un système de tuyauterie, en maintenant la température basse jusqu’à ce qu’il soit converti en un gaz par la chaleur acquise, après quoi, le cycle d’air se déclenchait à nouveau.
  En passant par cette zone réfrigérée, l’air se transformait en vapeur d’eau, protégée de la contamination par l’ammoniaque, et par la nature des tubes étanches, l’air revenait à l’état liquide. Cette eau était forcée de passer par des couches de séparation, à la fois à cause de la pression de pompage et l’osmose, et était ensuite emprisonnée dans la quatrième couche. Là, un autre système de tuyauterie acheminait l’eau recyclée (à partir de laquelle des précipitateurs de sel, également situés dans les deuxième et troisième couches, retiraient une grande partie de la salinité), dans les poches de récupération de la combinaison. Tout le rayonnement de la chaleur du corps qui demeurait après le passage à travers les couches de séparation, passait ensuite à travers la cinquième couche externe avec les gaz non utilisés.
  Le distille était considéré comme un vêtement sans attrait, mais essentiel, par la plupart des non-fremen ; sa fabrication apportait un revenu régulier à un certain nombre d’usines de sietch. Sur Arrakis, n’importe quel homme qui tenait à sa vie ne s’aventurait pas dans le désert sans un distille de fabrication fremen bien entretenu ; son importance se mesurait non seulement dans la survie des fremen eux-mêmes, mais dans le taux de mortalité des serviteurs Harkonnen auxquels les tribus refusaient catégoriquement de leur vendre ce type de marchandise.
  Après que Paul Muad’Dib Atréides soit devenu Empereur, un phénomène intéressant se produisit. Reconnaissant que la véritable source du pouvoir de l’Empereur résidait dans ses fremen, les courtisans qui souhaitaient progresser à la Cour, prirent pour coutume de porter le distille sous leurs vêtements de Cour. Que ces individus puissent porter ce vêtement alors qu’il n’était pas nécessaire, amusa l’Empereur et encore plus ses fedaydin. Quand il fut découvert que tous les distilles à la mode n’étaient que des répliques non fonctionnelles, leurs porteurs furent l’objet d’une telle dérision qu’ils abandonnèrent la pratique.
  Cependant, la mode fut relancée sous le règne de Leto II : les distilles portés par les fremen de musée étaient tout aussi inutiles. L’ironie n’avait échappé à l’Empereur-Dieu, et dans un bon nombre de ses articles dans ses Mémoires, il appelle les fremen de musée « les dandies des sables dont la robe ferait rire un vrai fremen jusqu’à ce qu’aucun rire ne reste ». Leto conservait un petit nombre de distilles, fabriqués dans le style ancien, dans sa citadelle, pour être utilisés par des personnes qu’il souhaitait qu’elles l’accompagnent dans le sareer. C.W.


Autres références :
-          Fremen ;
-          Tente-distille ;
-          Janet Oslo, Fremen : vies et légendes (Salusa Secundus : Morgan et Sharak).



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