Tente-distille
Les
premières versions de ce logement portable du désert furet développées par les
nomades zensunni envoyés sur Ishia (seconde planète de Tygri Beta) en 5295.
Bien que l’environnement d’Ishia fut beaucoup plus doux pour l’homme que celui
auquel étaient habitués les nomades – celui de Salusa Secundus, où leur peuple
fut maintenu en esclavage durant neuf générations – il était chaud, aride et
impitoyable. L’eau, dans ce désert écologique, était une denrée précieuse et ne
pouvait être gaspillée ; les tentes-distille étaient destinées à réduire
ces déchets.
Les
premières unités étaient brutes et servirent les desseins des zensunni d’Ishia.
Une couche externe de chromoplastique devenait d’un blanc réfléchissant pendant
les heures d’ensoleillement, puis revenait à une transparence normale pendant
la nuit. L’eau qui précipitait sur la surface refroidie coulait dans de minces
conduits intégrés dans les bords inférieurs de la tente et était aspirée dans
les poches de récupération situées dans les coins. Le processus se répétait
dans une moindre mesure sur la doublure intérieure : la chute de la température
était insuffisante pour avoir un pourcentage important de l’humidité perdue par
la respiration de l’habitant à l’intérieur de l’air chauffé. Une petite
récupération était pratiquée par la tente, qui servait aussi à traiter les
urines, mais les déchets solides servaient, le plus souvent, d’engrais.
Une
fois que les zensunni – appelés fremen – furent transférés sur Arrakis en 7193,
ils réalisèrent que la conception ishienne était primitive et inefficace. Le
premier changement fut de taille. Sur Ishia les tentes-distille étaient le plus
souvent utilisées comme des maisons semi-permanentes, et elles étaient
construites pour permettre de se tenir debout, de marcher et de stocker. La
tente-distille arrakeen, en revanche, n’était destinée qu’à servir de refuge temporaire
aux fremen qui quittaient la sécurité de leur sietch. Elles étaient
volontairement petites, assez pour fournir suffisamment de place pour s’assoir
confortablement, s’étendre et dormir, et stocker de petites quantités d’eau,
des kits de réparation de distille, et d’autres éléments vitaux pour la survie
dans le désert.
La
forme de la tente changeait selon la taille. Plutôt que de les monter sur un
pic central, les nouvelles tentes-distille étaient fabriquées avec un toit
incurvé ; vu de l’extrémité, la tente ressemblait à un cylindre dont la
partie inférieure était aplatie à l’endroit où elle touchait le sol.
Autre
chose changea, la porte-rabat extérieure utilisée dans le modèle ishien :
un sceau-sphincter en plastique transparent l’avait remplacé, permettant à ceux
qui étaient à l’intérieur de voir à l’extérieur, tout en préservant l’intégrité
de la tente-distille. Les volets intérieurs pouvaient servir à bloquer le sceau
et occulter la lumière indésirable.
Les
changements les plus frappants cependant, impliquaient la capacité de la
tente-distille à conserver l’humidité. Le tissu qui constituait la majeure
partie de la tente était le même que celui mis au point pour les distilles
fremen, ces vêtements qui étaient capables de contenir la perte d’humidité de
leur porteur à pas plus d’un dé à coudre par jour. Si l’on coupait un
échantillon de ce tissu, on verrait de nombreuses micro-constructions visant à
garder l’eau arrachée, si précieuse dans l’environnement arrakeen. La couche
destinée à l’intérieur de la tente (ou, dans le distille, celle près de la
peau) était poreuse et permettait à la transpiration et à l’humidité expirée,
d’avoir un passage libre. Les deux couches suivantes contenaient des filaments
d’échange de chaleur, si efficaces, qu’une tente-distille en bon état pouvait
être en moyenne dix degrés plus froide que la température extérieure et les
précipitateurs de sel gardaient un niveau physiologique de l’eau recyclée bien
en dessous de 150 parts par million. La quatrième couche piégeait l’eau obtenue
par la pression osmotique et la canalisait dans les tubes des poches de
récupération ; cette couche, la tuyauterie et les poches de récupération
elles-mêmes étaient fabriqués en matière plastique dont la finesse arrivait à
des ajustements de niveau moléculaire où l’eau ne pouvait pas adhérer. La
couche finale, la plus externe, permettait le passage de la chaleur (un aller
simple) et de la plupart des gaz, mais était complètement imperméable à l’eau.
Il
convient de noter que ce tissu, aussi magnifiquement conçut, ne pouvait pas
fonctionner aussi efficacement si c’était une tente que lorsque c’était un
distille. Une tente-distille protégeait ses utilisateurs contre la perte
d’humidité de leur corps lors de la respiration, ainsi que celle qui
s’échappait de leurs mains, des visages et autres surfaces corporelles
découvertes. Elle n’était pas fabriquée pour traiter les déchets ou pour la
récupération totale de la transpiration d’un corps, et ceux à l’intérieur
étaient donc contraints de rester dans leur distille. En dépit de ce léger
inconvénient, une tente-distille fremen était encore le refuge le plus sûr pour
ceux qui étaient contraints de rester dans le désert ; les copies
produites dans les usines de village étaient très inférieures. De ce fait, les
tentes-distille étaient d’authentiques et précieux articles commerciaux, et
leur vente à des étrangers fournissaient de confortables revenus pour bon
nombre de sietchs. Il y avait un groupe, cependant, à qui les tribus
indépendantes refusaient farouchement d’offrir leurs tentes-distille : les
oppresseurs Harkonnen.
Les
Harkonnen reconnaissaient l’excellence des produits fremen, autant qu’ils
méprisaient et persécutaient leurs fabriquants. En 10185, un raid simultané sur
trois sietchs du nord (Tuono, Remmel et Ammit), fut commandé par Glossu Rabban.
Les habitants semblaient avoir fui avec une hâte inhabituelle, laissant
derrière eux la plupart des produits de leurs usines. Les troupes emportèrent
tout ce qu’ils trouvèrent, y compris un grand nombre de tentes-distille. Ce qui
sembla d’une agréable ironie au gouverneur planétaire, fut que les distilles
récupérés furent donnés à un autre groupe de soldats envoyé pour rassembler des
personnes que Rabban appelait « l’écume du désert ». Ce ne fut que
lorsque les troupes ne revinrent pas, qu’elles furent recherchées et qu’il fut
constaté que les tentes-distille avaient été exposée à des variations de
megara. Une fois qu’elles furent scellées au loin, avec les soldats à l’intérieur,
elles commencèrent à accumuler la chaleur : les filaments qui devaient
normalement conduire la chaleur vers l’extérieur de la zone, l’attirèrent dans
la tente, si bien que la température était plus haute qu’à l’extérieur. La
hausse déclencha un changement dans le sceau-sphincter qui était fabriqué, dans
ces tentes, à partir d’un plastique qui était d’abord fondu, puis durci par la
chaleur ; au moment où l’intérieur était devenu trop chaud, la porte fut
fermée et impossible à ouvrir.
La
couche de tissu qui était censée transporter l’eau récupérée, fut ainsi changée
et les troupes paniquèrent quand ils comprirent que leur chemin était coupé par
de la shigavrille étroitement tissée, imperméable à toute lame des Harkonnen,
avait été remplacée par du plastique ultra lisse.
Ceux
qui tentèrent de sortir grâce à leurs fusils laser, ne furent récompensés que
par une mort plus rapide quand la doublure en plastique réfléchit l’énergie à
l’intérieur, convertissant plus de 80% de la puissance du fusil en chaleur ;
les autres se retrouvèrent contraints à cuire lentement ou à se suicider.
Lorsque
les tentes furent ouvertes par le groupe de recherche – ils les découpèrent
assez facilement avec le faisceau d’un fusil laser depuis l’extérieur – un
rapport fut envoyé, de ce qui avait été trouvé à l’intérieur, au Comte Rabban,
et les résultats étaient prévisibles. Un pogrom (en grande partie inutile, car
les tribus s’y attendaient et étaient entrées dans la clandestinité) fut lancé
contre les fremen, et les troupes Harkonnen reçurent l’ordre de détruire tous
les produits des sietchs qu’ils découvriraient, plutôt que de les utiliser.
La
réaction des fremen au succès du piège fut tout aussi prévisible. Une
expression qui remonte à cette période l’illustre bien : « trois
choses que nous savons inutiles – du sable à un homme assoiffé, de l’eau à
shai-hulud et des tentes-distille au Mudir Naya ». (Mudir Naya, nom donné
à Rabban par les fremen, traduit par « le gouverneur des démons »).
Jusqu’à
l’arrivée des Atréides, on ne trouve aucune trace de personne liée à la Maison
régnante sur Arrakis, qui ait tenté d’utiliser une tente-distille fremen. C.W.
Autres références :
-
Arrakis ;
-
Fremen ;
-
Rabban,
Comte Glossu ;
-
Distille ;
-
Anon.Kitab al-Ibar : manuel du désert,
Rakis ref. cat. 1-Z288.
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