mercredi 4 novembre 2015

Balisette




Balisette
(Cette brève histoire de la balisette est contenue dans un cristal qui a sans doute été écrite au temps de Muad’Dib. Pourquoi Leto II choisit de sauvegarder celui-ci plutôt que des descriptions plus détaillées sur la fabrication des balisettes, reste inconnu. Une des explications possibles serait qu’elle fut écrite par Varota lui-même, comme un bref résumé de l’œuvre de sa vie, ou que ce pourrait être l’extrait d’un écrit plus important rédigé par Gurney Halleck. Ed.) 

  La balisette est un instrument de musique portatif à neuf cordes, joué par un seul musicien, habituellement un troubadour ou un membre de la noblesse. Elle ressemble un peu à un ancien instrument de musique de l’ancienne Terre, au début du voyage dans l’espace, connu sous le nom de « guitare ». Comme elle, la balisette se compose d’une chambre de résonnance, d’un manche, d’une tête, de cordes et de clés de réglage. Comme elle, la balisette peut être portée en bandoulière à l’épaule ou autour du cou, au moyen d’une sangle. En revanche, les décorations sur la sangle de la balisette affichent généralement la position et les origines du joueur, alors que pour la guitare elles ne sont que de simples décorations. Depuis l’époque d’Ahdn-Hahd, qui développa les techniques utilisées à ce jour, les meilleurs balisettes sont entièrement faites d’une résine fibreuse appelée Stimic. Cinquante-sept feuilles du matériau sont traitées par la chaleur, un processus exigeant une synchronisation précise. Les feuilles sont exposées à midi et pendant une heure, à la lumière intense du soleil et ce, durant cent jours consécutifs. Les rayons du soleil frappent le cœur du stimic selon des angles précis et progressifs, garantissant une résistance et une résonnance durable. Varota de Chusuk, un célèbre fabriquant de balisette, était connu pour affirmer qu’une négligence ou une erreur durant le processus, ruinait les qualités sonores de l’instrument.
  A la fin de la durée de temps prescrite, c’est-à-dire à la fin de la dernière heure d’exposition au soleil, les feuilles traitées sont placées sur le moule de la balisette une à une. Le moule ainsi recouvert est replacé à la lumière du soleil où il reste jusqu’au coucher du soleil. Par la suite il est retourné toutes les heures, jour et nuit, pendant 40 jours. L’échauffement durant les heures de jour et le refroidissement durant la nuit, alors que les trois lunes de Chusuk effectuent un cycle complet, contribuent  à ce que les couches de stimic se fondent en un ensemble harmonieux.
  Chaque fabriquant a une forme principale sur laquelle le corps est fait. Avant l’époque d’Ahdn-Hahd, toutes les balisettes étaient faites en bois d’elacca, mais la propension de cette matière à traduire n’importe quelle musique atonale en sémuta empêcha la poursuite de son utilisation. Le Jihad Butlérien et son interdiction d’utilisation de toutes machines et instruments de toutes sortes, aboutit à l’abandon de l’utilisation du bois d’elacca dans la fabrication des balisettes.
  Durant des générations, et jusqu’à ce que Ahdn-hahd commença à travailler sur des balisettes en stimic, les balisettes ne furent plus fabriquées en grande quantité destinée à la vente. Les balisettes en bois d’elacca survivantes, servent généralement de forme et sont conservées sous haute protection.
  La réalisation d’une balisette implique une discipline très stricte et une obéissance aveugle. Pour un luthier, ces qualités sont cruciales. L’art consommé d’un luthier comme Varota consiste à coordonner les efforts de ses apprentis pour produire un instrument qui soit une œuvre d’art.
  Peu importe avec quel soin le processus de mise en forme est réalisé, il existe toujours des différences dans la qualité tonale du nouveau corps de la balisette. Grâce à un polissage judicieux, la balisette encore inachevée, acquiert ses propres caractéristiques sonores. Au-delà de cela, les caractéristiques propres au corps doivent être respectées comme les qualités des neuf cordes.  Une balisette au ton autoritaire n’apprécierait pas des cordes douces, comme des cordes plus dures sur un instrument plus doux seraient une indignité.
  Les cordes sont produites en étirant de longs filaments de stravidium jusqu’à ce que la longueur adéquate soit obtenue. La rapidité avec laquelle les filaments sont étirés détermine la tonalité de la corde. Un étirement rapide produit une note plus courte et plus stridente. Les étirements lents ont pour résultat un son plus doux. Il faut également prendre en considération le fait que les filaments ne peuvent être simplement coupés à la longueur requise : ils doivent être étirés jusqu’à la bonne mesure. Si un filament particulier est étiré trop long ou pas assez, il doit être rejeté et le processus doit être repris du début.
  Chacune des neuf cordes est capable de couvrir une gamme comprise entre celle de ses voisines, incluant la note la plus élevée de sa voisine la plus basse, et la note la plus basse de sa voisine la plus haute. Les cordes sont accordées suivant une gamme de sept tons de sans demi-ton. Sept des neuf cordes sont séparées par une quarte, en commençant par le Do. La gamme évolue ainsi : Do, Fa, Si, Mi, La, Ré, Do. Ces notes sont toutes de tempérament égal, assurant ainsi une fidélité du son et de la tonalité. L’absence de demi-ton rend l’usage de la gamme tempérée obligatoire puisque même un tempérament inégal détruirait le facteur harmonique caractéristique. Les cordes 8 et 9 sont des bourdons placés sur le côté du manche de l’instrument. Ce sont des cordes de basse accordées selon la hauteur appropriée pour le mode désiré en ajustant la clé située sur le corps de l’instrument. Elles sont très sensibles aux harmoniques particulières de la corde en train d’être pincée. Cette caractéristique rend la balisette, même mes balisettes en stimic, très efficace pour évoquer la musique de la sémuta. Les bourdons, en plus du soutien qu’ils leur apportent, donnent aux combinaisons atonales des notes de sémuta, une intensité surréelle. Les cordes qui produisent les tonalités les plus basses sont enroulées de filaments supplémentaires avec une attention particulière pour le nombre de tours par millimètre. Chaque corde est fixée au pied de la balisette en l’enroulant d’une certaine façon à de petits crochets situés sous l’ouïe de la caisse de résonnance. Au niveau de la tête de l’instrument, chaque corde est enroulée autour de sa propre clé d’accord. Une fois que tout cela est réalisé, il ne reste plus qu’à accorder la balisette naissante et d’y graver le nom de naissance de celui qui l’a commandé. Ce premier accordage est d’une très grande importance car il imprime aux cordes leur sonorité et assure que par la suite, seuls de petits ajustements seront nécessaires.
  La lyre, le luth et la zythra furent les premiers ancêtres de la balisette. Les grands instruments perdirent la faveur des musiciens au début de l’exploration spatiale, alors que les navettes n’offraient qu’un espace de stockage limité. L’instrument qui rencontra le plus de succès auprès des voyageurs de l’espace fut peut-être le crohm-vellar – un petit tambourin à corde dont l’avantage était d’être particulièrement bien adapté au voyages car les effets de la vitesse et de la pesanteur l’affectait peu. De ces débuts modestes furent développés le fardahggen et la vintule. Ces deux instruments étaient vraiment une petite version de la balisette, mais ils étaient surchargés de bourdons, avec trois ou quatre cordes, beaucoup trop en comparaison de leur grossièreté. La balisette naquit de la colonisation de l’espace : des communautés s’établirent et les planètes furent colonisées. Bientôt, un instrument légèrement plus grand se développa. Cet instrument devait être assez compact pour que les personnes puissent le prendre dans leurs longs voyages intra ou interplanétaires. La balisette naquit donc de l’opportunisme.
  L’avenir de l’instrument était difficile à prévoir. Des scientifiques comme Ahdn-hahd et des artistes comme Varota furent découragés par la perte d’apprentis venant frapper à leur porte. Les troubadours se firent de plus en plus rares sur les routes et on put rarement les entendre sur les places publiques des villes. Les familles nobles ne semblaient pas encourager les jeunes à apprendre l’art de la balisette et peu de gens du peuple eurent les moyens d’en acheter une. Cependant, la rumeur fit état que la ville natale de Varota sur Chusuk prévoyait d’organiser un festival annuel de la balisette en l’honneur de son fameux artiste. Des joueurs venant des quatre coins de la galaxie étaient attendus et cet événement suscita un intérêt nouveau pour la balisette.

Autres références :
-          Liquallo ;
-          Halleck, Gurney ;
-          EB Setro, Techniques de fabrication d’instruments sous le règne de l’Empereur Padishah (Chusuk – Sarejinas) ;
-          Anon, La Balisette, Rakis ref. cat.

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