lundi 14 décembre 2015

Butlérien, Jihad ou « La Grande Révolte » ; Causes et effets



Butlérien, Jihad ou « La Grande Révolte » ; Causes et effets
  Avant l’avènement des Atréides, les historiens se chamaillèrent pour savoir si les personnes faisaient de grandes choses ou si c’étaient les grandes choses qui avaient fait les personnes formidables. L’impact sur l’histoire de Muad’Dib et l’Empereur Leto rend la question discutable, mais avant ces éminents personnages, la question était déjà discutée. Nous sommes confrontés à la question, en particulier lorsque l’on considère les événements comme le pivot central de ceux qui ont eu lieu entre 200 et 108 A.G. : un changement radical énorme dans la marée humaine qui avait produit Jehanne Butler (voir Butler, Jehanne) une femme remarquable et luminescente qui changea le cours de l’histoire humaine.
  Même le nom que nous utilisons pour la période, implique une réponse à la question : si nous appelons ces événements « Le Jihad Butlérien », nous sommes d’accord avec les historiens qui définissent comme « grandes » les personnes qui déplacent la masse de l’humanité dans une nouvelle direction ; si nous utilisons « La Grande Révolte », nous nous allions à ceux qui voient les « chefs » comme de simples grades d’une humanité en mouvement dont la direction est déterminée par les masses.
  Les historiens proches de ces événements ont également spéculé sur cette même question. Les écrits de l’un d’eux, découvert récemment, montre comment ce tournant a été vu, dans le calme immédiat qui suivit cela. Kruwl Sheivvun (113-185) servit comme historien impérial sous Saudir H, salut son œuvre majeure, La Fondation de l’Empire, Sheivvun parle du jihad en employant la métaphore des vagues, comme s’il était touché par des marées. Le flux, chaque vague se casse et recule, mais la série de vagues glisse de plus en plus haut sur la plage, jusqu’à ce que la marée haute soit atteinte. Si quelqu’un veut détourner les eaux de la marée haute pour des buts humains, la tâche sera impossible pendant le reflux. Il en est de même pour les affaires humaines. Une volonté populaire de changement est sans but, sans direction capable ; mais le « Grand chef » sans assistance prête termine toujours dans l’obscurité. Cependant, lorsque le génie humain se combine avec le mouvement des marées du peuple, de nouvelles orientations en résultent. Le jihad suivait une telle combinaison.
  Sheivvun était le premier historien à souligner que l’Empire reposait sur une structure en trépied, composée de la Maison Corrino (soutenue par les sardaukars), la Guilde Spatiale et la CHOM. Le jihad ouvrit la voie à l’établissement des trois organisations qui n’existaient pas avant la Grande Révolte. Dans ses recherches sur les conditions qui menèrent à la fondation de l’Empire, Sheivvun en vint nécessairement à considérer les événements qui avaient ouverts cette voie. Il commença à examiner les systèmes de commerce et le gouvernement.
  Le commerce dépendait, bien sûr, du transport et de la politique en matière de communications. Né de ces fonctions, avant la Grande Révolte, il fut coordonné par des ordinateurs – reliés à la fois en groupes plus ou moins grands selon les systèmes planétaires et reliés entre commerçants qui dépendaient de vaisseaux plus rapides que la lumière et dont la progression dans l’hyperespace était contrôlée par des ordinateurs.
  Par exemple, considérez Transcom, une société de négoce, établie depuis près de sept mille ans : les quantités de données écrasantes qu’il fallait traiter en une fraction de secondes pendant les voyages dans l’hyperespace, poussèrent Transcom à adresser ses vaisseaux à une banque de données informatiques centrale, Centrans, située sur un satellite artificiel, Xénophon. Quand un vaisseau entrait dans l’hyperespace, sa destination était transmise à Centrans via les ondes Holtzman. Au cours de la progression du vaisseau, à des points prédéterminés sur sa route, Centrans traitait et corrigeait les informations de sa trajectoire. Lorsque le vaisseau atteignait la première « boîte aux lettres », il rentrait dans l’espace normal et recevait des mises à jour de Centrans – la banque informatique traitait simultanément le routage de plus de douze mille vaisseaux ; au cours de sa longue histoire, diverses associations marchandes avaient souscrit aux services de Transcom – l’association Van Rijn, Asconel, Les Courriers des Voyageurs Lointains, et beaucoup d’autres. Avec une perception claire de la nécessité des satellites de communication, les croisés du jihad frappèrent tôt Xénophon et les établissements semblables. Le résultat fut immédiat et définitif : l’effondrement total du commerce interstellaire régulier. Si Transcom (et les sociétés similaires) n’avait pas été détruit par le jihad, il n’y aurait eu aucun vide de transport à combler par la Guilde Spatiale.
  Comme pour le commerce, l’organisation politique du gouvernement, avant le jihad, avait pris plusieurs formes, bien que quelques planètes étaient absolument indépendantes. Le plus souvent, elles se liaient à leurs voisins les plus proches en formant des fédérations, des confédérations, des syndicats, des pastorats, des hiérarchies, des feudocracies, des néofeudocracie, des coalitions, des républiques, empires coloniaux, dominions autonomes – toutes formes d’associations que l’ingéniosité de dix milles mondes peuvent créer. Ces groupes variaient en taille, d’une poignée de mondes à des parlements de centaines de systèmes. Pourtant, chacun dépendait de la communication : si un membre d’une fédération était en danger, l’appel à l’aide était envoyé par des machines automatiques qui s’auto-réparaient. Sans ces machines, la communication était lente et aléatoire et les planètes devaient compter sur leurs propres ressources.
  Les grandes Maisons survécurent au chaos politique de la Grande Révolte (certaine en tirèrent profit) et beaucoup virent les milliers de planètes divisées comme la cueillette de fruit mûrs. Tous ces fruits furent frappés par une guerre qui dura un siècle et tous les Empereurs potentiels convoitèrent la couronne impériale. Les Corrino furent les vainqueurs, mais les premiers membres de cette Maison ne réalisèrent pas la dette qu’ils avaient envers le jihad butlérien : même les légendaires sardaukars auraient eu du mal à déclencher une contrattaque unifiée et organisée à partir d’une confédération d’une centaine de mondes. Le jihad, en brisant les premières communications interstellaires, rasa les gouvernements grands ou petits, de planète en planète, ne laissant que des décombres, prêts à être reconstruits par le plus agile des barbares. Le jihad butlérien prépara alors le chemin pour l’établissement de l’Empire ; de la même façon, elle fut elle-même une préparation de petites vagues durant des siècles, pour la marée haute.
  Une ombre dont nous ne connaissons que le nom – Dulden – entre dans les récits historiques en 711 A.G., comme fondateur d’un groupe appelé « humanité d’abord », organisé pour promouvoir une défiance envers les ordinateurs et préconiser de mettre en doute les jugements des machines. C’est dans les mêmes circonstances que les tensions, amplifiées, provoquèrent des troubles 500 ans plus tard. Quelques rares planètes – comme Sarash-Zillish – avaient eu leurs propres pogroms informatiques, bien avant la naissance de Jehanne Butler.
  Quand elle apparut sur la scène publique, puis comme support indépendant du mouvement qu’elle créa, tout était déjà en place sue des milliers de mondes, attendant une personnalité qui unifierait la cause.
  Après sa conquête de Komos, son monde natal et sa planète-mère Richèse (détaillé dans l’article « Butler, Jehanne »), une frénésie déferla sur les forces victorieuses, alimentée à parts égales de fanatisme hystérique et de calculs cupides. Lorsque Jehanne mourut en 182 A.G., la cause ne perdit pas un leader, elle gagna un martyr. Les généraux qui continuèrent en son nom furent animés d’une ardeur qu’elle n’aurait pas imaginée ; elle connaissait ses craintes et ses faiblesses, les défauts qui furent oubliés par ses adorateurs.
  Kruwl Sheivvun fut le premier à découvrir que les forces du jihad avaient un autre motif : la richesse. Sheivvun constata que la plus grande partie des forces du jihad, sur toutes les planètes, étaient des mercenaires, généralement recrutés sur la dernière planète conquise. Les plus aventureux et désargentés, pouvaient facilement être tentés par un butin à une échelle planétaire.
  Et Sheivvun fit une ultime découverte, quelque chose qui est maintenant pleinement apprécié : le jihad butlérien ne fut pas une campagne monolithique qui traversa violemment la galaxie humaine. Au contraire, il fut composé de milliers de forces distinctes durant près d’un diècle. Pour concevoir le jihad, il ne faut pas penser aux Fremen de l’armée impériale de Paul, mais plutôt à des flottes de pirates qui se déplaçaient quand et où leurs commandants le voulait et ils avaient peu de points communs entre eux, seulement le nom de Jehanne Butler, et une haine pour les machines qu’ils ne pouvaient ni comprendre ni remplacer. Plusieurs fois – comme sur Wencolley, par exemple – la résistance locale était absente, mais la planète fut dévastée par les combats entre deux groupes de croisés, chacun déterminé à prouver la pureté de sa foi par l’ampleur de sa cruauté.
  Jehanne partie, le jihad n’avait pas d’objectif plus élevé que la destruction de tous les ordinateurs. Il réussit son but au-delà de toute attente, puis le mouvement diminua car il trouva de moins en moins de cibles à sa colère. Dans son sillage – et en continuant la métaphore de Sheivvun – comme il refluait, il laissa à la fois la pauvreté s’installer : il avait brûlé d’une telle haine et d’une telle crainte des machines pensantes, tellement profondément ancrées dans la psyché humaine, qu’on se demande si cette blessure a complètement guérit. Pourtant, dans le même temps, il est difficile de nier que toutes les expansions de personnes et de société que cela engendra – la formation des mentats, la Guilde Spatiale et l’empire lui-même – devinrent non seulement possibles, mais nécessaires grâce au jihad. Peser les pours et les contres, les talents et ressources retrouvés en contrepartie des souffrances qui suivirent, cela nécessiterait une échelle qui n’a pas encore été inventée. FM

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire