Impérial,
Le système monétaire
Malgré
la relative rareté des informations économiques dans les documents de Rakis qui
furent examinés, une grande quantité concernait les systèmes commerciaux et
financiers de l’Imperium. Des livres de compte et autres matériaux semblables
étaient parmi les plus répandus, ainsi que des enregistrements humains ;
certains dossiers d’assurances Richésiens étaient connus pour dater d’au
moins vingt mille ans. Ainsi, nous
sommes en mesure de parler avec confiance des questions d’argent de l’univers
humain, né avant la mise en place du monopole de la Guilde et après
l’établissement et le développement d’un système monétaire uniforme, devenu
possible et nécessaire.
Dans
les millénaires avant le Jihad Butlérien, le commerce entre les 12 à 15.000
planètes connues et habitées, était intense mais désordonné. Même après le
développement du Landsraad, il n’y avait pas de gouvernement central fort, et
parmi les gouvernements des différentes planètes et systèmes, il n’y avait
aucun accord sur une base économique. Ainsi, il n’y avait aucun moyen d’avoir
un commerce général. La méthode de commerce interstellaire habituelle était le
troc, et cette méthode fut maintenue jusqu’en 491. Jusqu’à cette date, la CHOM
et les Grandes Maisons se contentaient de mesurer leur richesse sur les
produits de base qu’elles possédaient.
Mais
la Guilde ne pouvait pas accumuler des produits. La Guilde n’avait aucune
monnaie d’échange pour le troc sauf ses services. Durant le deuxième siècle de
son monopole, la Guilde commença doucement à faire campagne pour la mise en
place d’un système monétaire universel. Dans cet effort, elle fut certainement
soutenue par le Bene Gesserit et peut-être par le Tleilax et Ix, qui avaient
quelques difficultés à accumuler de grandes richesses sous forme d’avoir en
marchandises (il faut rappeler que la plupart des produits tleilaxu et ixien
étaient de moralité douteuse et d’une illégalité incontestable). Les Maisons
Mineures bénéficiaient aussi d’une économie monétaire, mais il semble peu
probable que l’une d’entre elles auraient pu exercer une quelconque influence à
cette époque.
La
Guilde fit construire, bien sûr, des entrepôts pour un seul produit : le
mélange, « l’épice » des épices. Il était extrêmement précieux, et
son approvisionnement était peu important et très irrégulier. Comme la norme
aurait permis de maintenir un taux d’inflation bas, en limitant l’augmentation
de la masse monétaire, cela permettait une expansion de l’économie. La Guilde
ne pouvait pas permettre de révéler sa propre utilisation du mélange, leur
propre usage devait rester secret. Elle essaya donc, pendant un moment, de
réintroduire la convoitise antique pour les métaux précieux ou les bijoux,
espérant ainsi, peut-être, faire de l’or et des saphirs une norme, mais
certains de ces matériaux étaient insuffisamment rares et aucun d’eux n’étaient
universellement convoités. La cupidité humaine avait pris trop de colorations
différentes.
Pour
finir, la Guilde conclut que dans une société stable, hiérarchisée et
contrôlée, il n’y avait aucune raison de ne pas employer une monnaie
entièrement artificielle. Ils multiplièrent leurs efforts pour persuader la
Maison Corrino et les autres administrateurs du CHOM, des avantages de
l’argent. Un avantage tel que la maniabilité, ne pouvait pas être mis en avant,
car cela aurait eu tendance à adoucir la rigidité du système des Faufreluches.
Les autres avantages tels que les facilités de transfert, l’emportaient sur les
dangers qui y étaient associés. Enfin, deux éléments importants faisaient
l’affaire de la Guilde : l’intérêt et l’effet de levier. Le premier
faisait appel au désir de richesse, le second à la volonté de pouvoir. La
Guilde ne se fatiguait jamais de souligner que les matières premières devaient
être produites ; pour augmenter la quantité, il fallait augmenter les
capacités de production. Et l’argent pouvait se reproduire, ce qui permettait
le prélèvement d’intérêts. La Guilde, à plusieurs reprises, avait démontré que
l’investissement d’une somme d’argent ou d’une dépense judicieuse, pouvait
générer des sommes beaucoup plus importantes, ce qui était avantageux pour
celui qui dépensait ou qui investissait. Les hommes de la Guilde étaient
heureux de montrer les multiples façons de générer des intérêts et les effets
de levier qui pouvaient fonctionner et permettre à ceux qui détenaient de
l’argent de faire de grands profits.
Pour
quelques Grandes Maisons, la Guilde avança un troisième argument, celui que
l’introduction d’argent rendrait le commerce interstellaire plus efficace,
moins cher et plus facilement accessible. Les Maisons pauvres qui devaient leur
position à la politique et aux accomplissements militaires, trouvèrent leurs
perspectives pour augmenter leur avancement économique par l’argent. Un
document inachevé dans la collection de Rakis fait mention de la réponse de
Marco Atréides, Comte de Thueste, à cet argument : « Dans mon
esprit, il ne fait aucun doute que l’introduction d’une devise commune et d’un
système bancaire impérial, donnerait à ma Maison une bonne occasion d’acquérir
une position politique dominante. Nous ne pourrions jamais construire de palais
avec le riz pundi. Mais je crains terriblement que le prix de l’argent fasse
l’honneur des Maisons qui la convoite. La soif de gloire peut faire d’un homme,
un guerrier ; la Soif de bois-brouillard peut faire de lui un
artiste ; la soif de femmes peut le rendre aussi nul qu’un imbécile. Mais
la soif d’argent ferait de lui un comptable. Un Tatréides attiré par l’argent
serait un Atréides attiré par la mort » (Lettre à Dona, lib. Conf. Temporaire, série 763).
Quels
que soient les mérites de la sensibilité du Duc Marco, il avait clairement vu
quelque chose que la Guilde ne mentionnait ni dans ses arguments ni dans ses
propositions : aucune introduction d’argent ne pouvait être simple car
cela ne pouvait pas se faire à l’échelle interstellaire dans l’adoption
concomitante de services bancaires interstellaires. Aucun autre document ne
montre que Marco avait compris, à juste titre, que la Guilde voulait être la
seule organisation capable d’assumer le rôle de banquier. Mais rien ne montre
que la Maison de Marco ne partagea pas ses appréhensions ni les raisons qui les
leur fit ignorer ; en 485, le Comte Nikos, petit-fils de Marco, fut inscrit,
avec la majorité du Landsraad, au vote crucial qui, six ans plus tard, mit le
solari en circulation.
Le
même vote désigna la Guilde comme le banquier de l’Imperium. Il n’y avait
jamais eu de banque impériale en tant que telle, ni aucune sorte de banque
centrale, mais comme Marco l’avait vu se profiler, la Guilde prit le contrôle
bancaire interstellaire parce qu’elle contrôlait les communications
interstellaires. L’information, comme les personnes, le plastacier, et les
portyguls, n’allaient d’étoile en étoile que dans les cales des navires de la
Guilde. Ainsi, l’argent, au même titre l’information, circulait uniquement
grâce à la Guilde. Chaque long-courrier et la plupart des petits vaisseaux
avaient au moins un commissaire de bord habilité à recueillir et à verser, à
prêter et emprunter, à détenir des valeurs fiduciaires, il était aussi courtier
et pouvait proroger ou retirer un crédit, et encaisser les traites ou les
modifier. Dans une certaine mesure, ces officiers étaient des entrepreneurs car
les pertes et profits de la Guilde dépendaient de la manière dont ils
conduisaient leurs affaires et cela avait un impact rapide et direct sur leur
classement dans la hiérarchie de la Guilde et donc dans leur accès à l’épice
gériatrique. Aucun Guildien n’avait de raison d’accumuler les solaris, aucun
moyen d’accumuler les possessions personnelles, mais ils pouvaient accumuler le
prolongement de leurs années de vie.
Comme
le solari n’était qu’un nom, un peu de papier de riz et un nombre de grammes,
il devait être défini en fonction de son pouvoir d’achat, dans une certaine
mesure, une fois que le système monétaire soit en place et fonctionne, sa
valeur se définissait par elle-même, simplement par le fait que les
utilisateurs se servaient de l’argent. Dans les années suivantes, le Landsraad,
en 485, et jusqu’en 491, la distribution de solaris était consacrée aux
négociations complexes pour fixer le point de départ du système. La Guilde,
subtilement et efficacement, résistait aux tendances qu’avaient l’Empereur ou
le Landsraad, à vouloir isoler le prix de l’épice pour en faire un déterminant
fondamental. Au lieu de cela, les négociateurs de la Guilde proposèrent une
formule complexe d’équivalence pour les produits de base. Le processus
d’échange des marchandises s’était suffisamment perfectionné au cours des
siècles et la Guilde, bien sûr, avait de nouveaux dossiers ainsi que des
rapports historiques faisant mention du poids/nombre/valeur de chacune des
marchandises. La formule qu’ils proposaient était un effort très honnête pour
préserver le classement économique relatif de toutes les Maisons. Ce débat dura
plus de quatre ans.
Les
ambitions contradictoires, les rivalités et les inimitiés entre les Maisons
tendaient finalement à s’annuler les unes les autres, et le poids de la Maison
Corrino s’installa progressivement à côté des formules de la Guilde. Seule la
version finale de cette formule est connue, mais elle fut certainement modifiée
par le débat, et seules quelques Maisons, ineptes et négligentes dans leurs
calculs financiers, furent affectées. La Maison Atréides, par exemple, n’avait
pas pu profiter de l’équation, une tonne de riz pundi équivalait à 29 grammes
de molybdène. Mais aucune Maison ne s’appauvrit ni ne devint riche en solaris
si elle n’était pas déjà riche en biens réels.
Comme
l’avait prédit la Guilde, le fonctionnement du marché apportait des changements
dans la valeur relative des produits et des matériaux, qui à leur tour,
changeaient la définition du solari. Tous les 25 ans, le personnel financier de
la Guilde, l’Empereur et le Landsraad, se rencontraient pour vérifier
l’historique du marché et apporter des modifications appropriées à la formule
d’évaluation du solari. La règle fondamentale de ces conférences était que le
changement de formule devait laisser le classement économique inchangé. Bien
que les conférences fussent des évènements politiques importants, la règle de
base semblait généralement bien respectée. Les manipulations les plus
artificielles des valeurs étaient faites pour encourager la production de
certains types de marchandises. Cependant, aucun prix ne restait fixe plus de
trois ans (sur la période, il y eut une « vague » économique qui se
propagea dans l’ensemble de l’Empire) et les banquiers de la Guilde purent
intervenir en faisant du dumping pour se débarrasser de certains produits.
Pendant
le règne de l’Empereur-Dieu, la gestion économique devint beaucoup plus rigide.
Tout ce qui concernait Leto était le présent ouvert sur l’avenir ; il ne
s’intéressait qu’aux relations que pour les changer, les modifier (et ce fut,
ironiquement, la dernière monnaie flexible dans l’histoire de l’Imperium. Par
exemple, pendant vingt-cinq siècles, peu importait l’approvisionnement, la
demande, un solari pouvait acheter un kilo de riz pundi. L’Empereur-Dieu ne
provoqua jamais de famine ; en enseignant son Sentier d’Or, Leto était
devenu un policier qui faisait un mauvais usage de l’application de la loi de
sorte que la restriction provoquait l’abrogation. La Dispersion fut certainement
l’abrogation de l’Imperium, et une des conséquences de cette explosion fut la
mise en place du drôle de système d’argent poly-variant que nous connaissons
aujourd’hui. Comme la Guilde, le solari devint un élément du passé. M.M.
Autres références :
-
CHOM ;
-
D.W.
Aliti, Comptes courants : les
principes bancaires et les pratiques de la Guilde (Kaitain :
Linthrin UP) ;
-
Dik
Benat, L’application de la formule
d’évaluation du solari, 1285-5085, 3v. TR. Hiizman Suradees
(Gruuzman ; Isabel) ;
-
Sian
Esva, Analyse croisée – variante de la
production d’épice et La
formule de la valeur du solari, 8895-11000 (Kaitain :
Varna) ;
-
Hokosima
Galant, La masse perdue : le
marché des produits de base et l’adoption du solari (Grumman :
Hartley UP) ;
-
K.
Gerun, Une étude des comptes de la
Guilde, issue des registres de Rakis (Butte : Sunimo-soso) ;
-
Harq
al-Ada, ed. Les lettres Atréides
Lib. Conf. Temp. Série 763).
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