Balisette
(Cette brève histoire de la balisette est contenue dans un cristal qui a
sans doute été écrite au temps de Muad’Dib. Pourquoi Leto II choisit de sauvegarder celui-ci plutôt que des
descriptions plus détaillées sur la fabrication des balisettes, reste inconnu.
Une des explications possibles serait qu’elle fut écrite par Varota lui-même,
comme un bref résumé de l’œuvre de sa vie, ou que ce pourrait être l’extrait
d’un écrit plus important rédigé par Gurney Halleck. Ed.)
La
balisette est un instrument de musique portatif à neuf cordes, joué par un seul
musicien, habituellement un troubadour ou un membre de la noblesse. Elle
ressemble un peu à un ancien instrument de musique de l’ancienne Terre, au
début du voyage dans l’espace, connu sous le nom de « guitare ».
Comme elle, la balisette se compose d’une chambre de résonnance, d’un manche,
d’une tête, de cordes et de clés de réglage. Comme elle, la balisette peut être
portée en bandoulière à l’épaule ou autour du cou, au moyen d’une sangle. En
revanche, les décorations sur la sangle de la balisette affichent généralement
la position et les origines du joueur, alors que pour la guitare elles ne sont
que de simples décorations. Depuis l’époque d’Ahdn-Hahd, qui développa les
techniques utilisées à ce jour, les meilleurs balisettes sont entièrement
faites d’une résine fibreuse appelée Stimic. Cinquante-sept feuilles du
matériau sont traitées par la chaleur, un processus exigeant une
synchronisation précise. Les feuilles sont exposées à midi et pendant une
heure, à la lumière intense du soleil et ce, durant cent jours consécutifs. Les
rayons du soleil frappent le cœur du stimic selon des angles précis et
progressifs, garantissant une résistance et une résonnance durable. Varota de
Chusuk, un célèbre fabriquant de balisette, était connu pour affirmer qu’une
négligence ou une erreur durant le processus, ruinait les qualités sonores de
l’instrument.
A la fin de la durée de temps prescrite,
c’est-à-dire à la fin de la dernière heure d’exposition au soleil, les feuilles
traitées sont placées sur le moule de la balisette une à une. Le moule ainsi
recouvert est replacé à la lumière du soleil où il reste jusqu’au coucher du
soleil. Par la suite il est retourné toutes les heures, jour et nuit, pendant
40 jours. L’échauffement durant les heures de jour et le refroidissement durant
la nuit, alors que les trois lunes de Chusuk effectuent un cycle complet,
contribuent à ce que les couches de
stimic se fondent en un ensemble harmonieux.
Chaque fabriquant a une forme principale sur
laquelle le corps est fait. Avant l’époque d’Ahdn-Hahd, toutes les balisettes
étaient faites en bois d’elacca, mais la propension de cette matière à traduire
n’importe quelle musique atonale en sémuta empêcha la poursuite de son
utilisation. Le Jihad Butlérien et son interdiction d’utilisation de toutes
machines et instruments de toutes sortes, aboutit à l’abandon de l’utilisation
du bois d’elacca dans la fabrication des balisettes.
Durant des générations, et jusqu’à ce que
Ahdn-hahd commença à travailler sur des balisettes en stimic, les balisettes ne
furent plus fabriquées en grande quantité destinée à la vente. Les balisettes
en bois d’elacca survivantes, servent généralement de forme et sont conservées
sous haute protection.
La réalisation d’une balisette implique une
discipline très stricte et une obéissance aveugle. Pour un luthier, ces
qualités sont cruciales. L’art consommé d’un luthier comme Varota consiste à
coordonner les efforts de ses apprentis pour produire un instrument qui soit
une œuvre d’art.
Peu importe avec quel soin le processus de
mise en forme est réalisé, il existe toujours des différences dans la qualité
tonale du nouveau corps de la balisette. Grâce à un polissage judicieux, la
balisette encore inachevée, acquiert ses propres caractéristiques sonores.
Au-delà de cela, les caractéristiques propres au corps doivent être respectées
comme les qualités des neuf cordes. Une
balisette au ton autoritaire n’apprécierait pas des cordes douces, comme des
cordes plus dures sur un instrument plus doux seraient une indignité.
Les cordes sont produites en étirant de longs
filaments de stravidium jusqu’à ce que la longueur adéquate soit obtenue. La
rapidité avec laquelle les filaments sont étirés détermine la tonalité de la
corde. Un étirement rapide produit une note plus courte et plus stridente. Les
étirements lents ont pour résultat un son plus doux. Il faut également prendre
en considération le fait que les filaments ne peuvent être simplement coupés à
la longueur requise : ils doivent être étirés jusqu’à la bonne mesure. Si
un filament particulier est étiré trop long ou pas assez, il doit être rejeté
et le processus doit être repris du début.
Chacune des neuf cordes est capable de
couvrir une gamme comprise entre celle de ses voisines, incluant la note la
plus élevée de sa voisine la plus basse, et la note la plus basse de sa voisine
la plus haute. Les cordes sont accordées suivant une gamme de sept tons de sans
demi-ton. Sept des neuf cordes sont séparées par une quarte, en commençant par
le Do. La gamme évolue ainsi : Do, Fa, Si, Mi, La, Ré, Do. Ces notes sont
toutes de tempérament égal, assurant ainsi une fidélité du son et de la
tonalité. L’absence de demi-ton rend l’usage de la gamme tempérée obligatoire
puisque même un tempérament inégal détruirait le facteur harmonique
caractéristique. Les cordes 8 et 9 sont des bourdons placés sur le côté du
manche de l’instrument. Ce sont des cordes de basse accordées selon la hauteur
appropriée pour le mode désiré en ajustant la clé située sur le corps de
l’instrument. Elles sont très sensibles aux harmoniques particulières de la
corde en train d’être pincée. Cette caractéristique rend la balisette, même mes
balisettes en stimic, très efficace pour évoquer la musique de la sémuta. Les
bourdons, en plus du soutien qu’ils leur apportent, donnent aux combinaisons
atonales des notes de sémuta, une intensité surréelle. Les cordes qui
produisent les tonalités les plus basses sont enroulées de filaments
supplémentaires avec une attention particulière pour le nombre de tours par
millimètre. Chaque corde est fixée au pied de la balisette en l’enroulant d’une
certaine façon à de petits crochets situés sous l’ouïe de la caisse de
résonnance. Au niveau de la tête de l’instrument, chaque corde est enroulée
autour de sa propre clé d’accord. Une fois que tout cela est réalisé, il ne
reste plus qu’à accorder la balisette naissante et d’y graver le nom de
naissance de celui qui l’a commandé. Ce premier accordage est d’une très grande
importance car il imprime aux cordes leur sonorité et assure que par la suite,
seuls de petits ajustements seront nécessaires.
La
lyre, le luth et la zythra furent les premiers ancêtres de la balisette. Les
grands instruments perdirent la faveur des musiciens au début de l’exploration
spatiale, alors que les navettes n’offraient qu’un espace de stockage limité.
L’instrument qui rencontra le plus de succès auprès des voyageurs de l’espace
fut peut-être le crohm-vellar – un petit tambourin à corde dont l’avantage
était d’être particulièrement bien adapté au voyages car les effets de la
vitesse et de la pesanteur l’affectait peu. De ces débuts modestes furent
développés le fardahggen et la vintule. Ces deux instruments étaient vraiment
une petite version de la balisette, mais ils étaient surchargés de bourdons,
avec trois ou quatre cordes, beaucoup trop en comparaison de leur grossièreté.
La balisette naquit de la colonisation de l’espace : des communautés
s’établirent et les planètes furent colonisées. Bientôt, un instrument
légèrement plus grand se développa. Cet instrument devait être assez compact
pour que les personnes puissent le prendre dans leurs longs voyages intra ou
interplanétaires. La balisette naquit donc de l’opportunisme.
L’avenir de l’instrument était difficile à
prévoir. Des scientifiques comme Ahdn-hahd et des artistes comme Varota furent
découragés par la perte d’apprentis venant frapper à leur porte. Les
troubadours se firent de plus en plus rares sur les routes et on put rarement
les entendre sur les places publiques des villes. Les familles nobles ne
semblaient pas encourager les jeunes à apprendre l’art de la balisette et peu
de gens du peuple eurent les moyens d’en acheter une. Cependant, la rumeur fit
état que la ville natale de Varota sur Chusuk prévoyait d’organiser un festival
annuel de la balisette en l’honneur de son fameux artiste. Des joueurs venant
des quatre coins de la galaxie étaient attendus et cet événement suscita un
intérêt nouveau pour la balisette.
Autres références :
-
Liquallo ;
-
Halleck, Gurney ;
-
EB Setro, Techniques de
fabrication d’instruments sous le règne de l’Empereur Padishah (Chusuk
– Sarejinas) ;
-
Anon, La Balisette,
Rakis ref. cat.
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