Et l'homme créa un dieu - Frank Herbert
Citations de début de chapitres
Il faut comprendre que la paix
est une affaire interne. Elle doit être une autodiscipline, tant pour
l'individu que pour la civilisation tout entière. Elle doit venir de
l'intérieur. Si l'on instaure un pouvoir extérieur pour imposer la paix, ce
pouvoir ne pourra que devenir de plus en plus contraignant. Il n'y a pas
d'alternative. Il en résultera inéluctablement une explosion, un cataclysme et
le chaos. Ainsi va notre univers. Lorsque l'on crée deux forces contraires,
l'une doit écraser nécessairement l'autre, à moins que ces deux forces ne
soient maintenues dans un délicat équilibre.
Les écrits de Diana Bullone
(Et
l’homme créa un dieu, page de garde)
Pour devenir un dieu, toute
créature vivante doit transcender le physique. Les trois étapes de cette voie
transcendantale sont connues. Dans un premier temps, la créature devra prendre
conscience de l’agression secrète. Ensuite, elle devra pénétrer les desseins
existant dans la forme animale. Enfin, elle devra faire l’expérience de la
mort. Lorsque cela sera accompli, le dieu naissant devra découvrir sa propre
résurrection au cours d’une épreuve unique où lui sera dévoilé celui qui l’a
appelé.
La Fabrication d’un dieu (Le
Livre d'Amel)
(Et
l’homme créa un dieu, page 9)
Une religion exige nombre de
connexités dichotomiques. Des croyants et des incroyants. Ceux qui connaissent
les mystères et ceux qui seulement les craignent. L’initié et le profane. Elle
exige à la fois un dieu et un diable. L’absolu et la relativité. Ce qui est informe
(quoiqu’en cours de formation) et ce qui est formé.
Le Génie religieux (Ecrits Secrets d'Amel)
(Et
l’homme créa un dieu, page 12)
Quiconque a déjà senti sa peau
parcourue de la conscience frissonnante d'une présence invisible connaît la
sensation primaire de Psi.
Halmyrach, Prieur d'Amel
(Psi et religion, préface)
(Et
l’homme créa un dieu, page 17)
L'un des problèmes majeurs lié à
la construction d'une religion, pour n'importe quelle espèce, est de
reconnaître et de s'abstenir d'interdire ces systèmes autorégulateurs propres
aux espèces et dont dépend la survie de ces espèces.
Le Génie religieux (Manuel pratique)
(Et
l’homme créa un dieu, page 28)
Toute créature pensante a besoin
d'une religion, quelle qu'elle soit.
Noah Arkwright (Les Ecrits fondamentaux d'Amel)
(Et
l’homme créa un dieu, page 45)
Prosternez-vous devant Ullua,
l'étoile vagabonde des Ayrbs. Qu'aucun blasphème ne soit proféré,
qu'aucun blasphémateur ne vive; puisse le blasphème brûler la bouche. Les
blasphémateurs sont maudits de Dieu et des élus. Puisse cette malédiction
frapper le blasphémateur de la plante des pieds au sommet du crâne, qu'il dorme
ou qu'il veille, qu'il soit assis ou qu'il soit debout...
Invocation du Jour de Bairam
(Et
l’homme créa un dieu, page 59)
Parce que les premières
manifestations Psi qui ont touché
l'humanité venaient de l'inconnu, les associations émotionnelles primitives
liées à Psi furent celles de la peur
et de la projection mãyã des fausses
réalités, celles des incubes et des succubes, des sorciers et des sabbats. Ces associations appartiennent
à notre capital génétique, et notre espèce a une forte propension à renouveler
les erreurs du passé.
Halmyrach, Prieur
d’Amel (Psi et Religion)
(Et
l’homme créa un dieu, page 75)
C'est à travers la mort que l'on
connaît la vie. Sans la constante présence de la mort, il ne peut y avoir ni
vigilance, ni suprématie de la conscience, ni issue dans le labyrinthe des
symboles pour le vide intégral.
Royali : La Religion pour Tous (Entretien avec le Prieur)
(Et l’homme
créa un dieu, page 80)
Au fur et à mesure que le
glossaire mythologique définit notre
compréhension primaire de Psi,
une transformation s'opère. Du grimoire se dégagent la curiosité et le
glissement de la peur vers l'expérience. Les hommes osent alors explorer cette
terrifiante frontière avec les outils analytiques de l'esprit. De ces
tâtonnements encore très largement naïfs découlent les premiers manuels
pragmatiques à partir desquels nous développons parallèlement Psi et la Religion.
Halmyrach, Prieur
d’Amel (Psi et Religion)
(Et
l’homme créa un dieu, page 87)
Une partie de notre problème est
centré sur l'effort d'introduire un contrôle extérieur sur un
système-de-système qui doit être maintenu par des forces internes en équilibre.
Nous ne cherchons ni à reconnaître ni à nous interdire d'inhiber ces systèmes
autorégulateurs de nos espèces desquels dépend la survie de ces espèces. Nous
ne tenons pas compte de nos propres fonctions de rétroaction.
Lewis Orne (Réflexions sur Hamal)
(Et
l’homme créa un dieu, page 90)
L'être humain fonctionne à partir
de complexes exigences de supériorité, cherchant à s'affirmer au travers d'un
rituel, insistant sur un besoin rationnel d'apprendre, s'efforçant d'atteindre
des buts qu'il s'est lui-même fixés, manipulant son environnement tandis qu'il
nie ses propres facultés d'adaptation, jamais pleinement satisfaites.
Conférences d'Halmyrach (Publication privée des
dossiers d'Amel)
(Et
l’homme créa un dieu, page 93)
En termes de systèmes humains, la
rétroaction implique de complexes processus inconscients, à la fois dans un
sens individuel et dans un sens collectif ou social. Le fait que les individus
peuvent être influencés par des forces inconscientes a été depuis longtemps
démontré. Néanmoins, les processus à grande échelle et leur influence sont
moins bien connus. Nous sommes enclins à ne les percevoir qu'à l'état latent,
dans un sens statistique, au travers de courbes de population, d'évolution
historique et de changements qui s'étirent sur des siècles. Nous imputons
souvent de tels processus aux forces religieuses et nous avons tendance à
éviter de les examiner avec un esprit analytique.
Conférences du Prieur
(Collection privée)
(Et
l’homme créa un dieu, page 106)
La musique est un élément
essentiel à nombre d'expériences Psi
qui sont désignées sous le nom de religion. A travers la force extatique les
sonorités rythmiques, nous percevons un
appel dirigé vers des pouvoirs hors du temps, dépourvus des dimensions
habituelles, largeur et longueur, emprisonnées dans l'état de matière, dans
notre coin d'infini dimensionnel.
Noah Arkwright (Les Formes
de Psi)
(Et
l’homme créa un dieu, page 114)
Nous avons un très ancien
proverbe : plus il y a Dieu, plus il y a diable ; plus il y a de chair, plus il
y a de vers ; plus la propriété est vaste, plus vaste est l'anxiété ; plus il y
a de contrainte, plus la contrainte est nécessaire.
Les Prieurs d'Amel (Commentaires
de Psi)
(Et
l’homme créa un dieu, page 123)
Ceux qui recherchent la
connaissance dans le but d'une récompense, et même en vérité la connaissance de
Psi, ne font que répéter les erreurs des religions primitives. La
connaissance issue de la peur ou de l'espoir d'une récompense vous enferme dans
les rets de l'ignorance. C'est ainsi que les anciens ont appris à falsifier
leurs vies.
Les Maximes des Prieurs (L'Approche de Psi)
(Et
l’homme créa un dieu, page 126)
Il y a un démon dans tout ce que
nous ne comprenons pas. La trame de l'univers apparaît noire à l’œil qui refuse
de voir. C'est ainsi que nous percevons un voile satanique d'où provient toute
insécurité. C'est dans le tissu de menace constante que nous parachevons notre
vision de l'enfer. Pour vaincre ce démon, nous recherchons l'illusion de la
Connaissance intégrale. Face à un univers infini, imminent derrière le voile
satanique, le Tout-Infini doit rester une illusion, seulement une illusion, et
rien de plus. Si l'on accepte ceci, le voile tombe.
Le Prieur Halmyrach (Religion au sein de Psi)
(Et
l’homme créa un dieu, page 132)
La mort a de nombreux aspects :
le Nirvâna, la roue sans fin de
l'Existence, l'équilibre entre l'organisme et la pensée conçue comme activité
pure, la tension/relaxation, la douleur et le plaisir, la recherche d'un but et
l'abnégation. La liste est inépuisable.
Noah Arkwright (Aspects de la Religion)
(Et
l’homme créa un dieu, page 143)
Un univers sans guerres implique
des concepts de masse critique appliqués aux êtres humains. Toute cause directe
qui pourrait conduire à la guerre est toujours transformée, par un phénomène
d'escalade, en questions de valeurs personnelles, en associations de synergie
technologique, en interrogations de nature éthico-religieuse pour lesquelles
sont ouvertes des zones de neutralisation, et où, inéluctablement, il reste les
inconnues, omniprésentes et sans doute d'une insidieuse complexité. La
situation humaine par rapport à la guerre peut être comparée à un système de
feedback multilinéaire et sinusoïdal dans lequel rien n'est sans
importance.
"La Guerre, le Non-possible" (Manuel de l'I.N., chapitre IV)
(Et
l’homme créa un dieu, page 155)
Lorsqu’un homme sage ne comprend
pas, il dit : « Je ne comprends pas. » Le sot et l’inculte
sont honteux de leur ignorance. Ils gardent le silence alors qu’une simple
question pourrait leur apporter la sagesse.
Maximes des Prieurs
(Et
l’homme créa un dieu, page 165)
Nous venons de l'Etre Suprême et
retournerons à l'Etre Suprême. Comment pourrions-nous cacher quoi que ce soit à
la Source qui était et à la Fin qui est ?
Maximes des Prieurs
(Et
l’homme créa un dieu, page 172)
Le jour est court, le travail est
grand et les travailleurs sont paresseux, mais la récompense est immense et
notre Maître nous exhorte à nous hâter.
Les Ecrits du Prieur Halmyrach
(Et
l’homme créa un dieu, page 175)
La trame de la violence létale
massive, ce phénomène que l'on appelle guerre, est soudé par un syndrome de
culpabilité/peur/haine qui se transmet, d'une manière comparable à une maladie,
par le conditionnement social. Bien que l'absence d'immunité à cette maladie
soit un fait typiquement humain, le mal lui-même n'est pas une condition
nécessaire et naturelle à l'existence. Parmi ces schémas de conditionnement qui
véhiculent le virus de la guerre, peuvent se trouver : la volonté de justifier
les erreurs passées, des sentiments pharisaïques et le besoin de perpétuer de
tels sentiments...
Umbo Stetson (Conférences à
l’Ecole Antiguerre)
(Et
l’homme créa un dieu, page 186)
Qu’est-ce qui est le mieux :
un bon ami, un bon cœur, un bon voisin, une bonne épouse, ou la compréhension
des conséquences ? Rien de tout cela. Une âme chaude et sensible qui
connaît la valeur de l’amitié et le prix de la dignité individuelle, voilà ce
qui est le mieux. »
L’étudiant Bakrish à son gourou)
(Et
l’homme créa un dieu, page 191)
L'enseignant qui n'apprend pas de
son élève n'enseigne pas. L'élève qui ricane face au savoir vrai de son
professeur est comme celui qui choisit les grappes vertes et dédaigne le doux
fruit de la vigne qui a pu prendre le temps de parvenir à maturité.
Maximes des Prieurs
(Et
l’homme créa un dieu, page 193)
Le silence est gardien de la
sagesse, mais les lourdes plaisanteries et la frivolité précipitent un homme
dans sa propre ignorance. Où règne l'ignorance, il n'y a pas de compréhension
de Dieu.
Maximes des Prieurs
(Et
l’homme créa un dieu, page 207)
L'ordre implique la loi. Ainsi
posons-nous la formule qui aide à notre compréhension de l'ordre, nous
permettant de prédire l'ordre, ou sinon d'en admettre la notion. Mais aller
jusqu'à affirmer que la loi nécessite l'intention est un autre problème. Cela, en effet, ne
découle en aucun cas de l'existence de la loi. En fait, la conscience de
l'éternité ouvre plutôt des horizons contraires. L'intention exige un
commencement : d'abord l'intention, puis la loi. L'essence de l'éternité n'est ni
commencement ni fin. Sans commencement, pas d'intention, pas d'éternelle
motivation. Sans fin, pas de but ultime, pas de jugement. De ces données, nous
posons en postulat que le péché et le crime, produits de l'intention, ne sont
pas des dérivées constantes de l'éternité. Et, à l'extrême, des concepts tels
péché-crime-jugement exigent des commencements, se présentant ainsi comme des
segments de l'éternité. Ces concepts sont des moyens de traiter la loi finie,
et, incidemment, de problèmes éternels. C'est ainsi que nous comprenons combien
limitées et limitatives sont nos projections sur Dieu.
Le Prieur Halmyrach (Le Défi
de l'Eternité)
(Et
l’homme créa un dieu, page 209-210)
L'envie, le désir et l'ambition
limitent l'homme à l'Univers de Mãyã. Et quel est cet Univers ?
Il n'est que la projection de son envie, de son désir et de son ambition.
Noah Arkwright (La Sagesse d'Amel)
(Et
l’homme créa un dieu, page 221)
Un usage matériel du pouvoir peut
détruire un ange. Telle est la leçon de la paix. L'amour de la paix et la
recherche de la paix ne sont pas suffisants. Il faut aussi aimer son prochain.
C'est ainsi que l'on apprend le conflit dynamique et amoureux que l'on appelle
la Vie.
Noah Arkwright (La Sagesse d'Amel)
(Et
l’homme créa un dieu, page 224)
Ce n'est pas nécessairement une
preuve d'amour que d'élever un mur autour de votre maître. Car comment peut-il
alors observer ses serviteurs et veiller à ce qu'ils le servent sans
arrière-pensée de récompense ? Non, mon fils, un mur est souvent oeuvre de peur
et réservoir à poussière.
Maximes des Prieurs
(Et
l’homme créa un dieu, page 227)
Comme Orne l'a précisé, le prophète qui réveille les morts renvois
réellement le corps matériel dans un temps où il est vivant. L'homme qui va de
planète en planète considère le temps comme une localisation spécifique ; sans
le temps pour s'étirer à travers lui, il n'y a pas d'espace. Orne a créé notre univers comme une
boule en expansion aux dimensions irrégulières. Ainsi, il a relevé mon défi et
répondu à ma prière. Nous pouvons continuer à contempler notre univers à
travers la grille de symboles que nous avons construite. Nous pouvons continuer
à déchiffrer notre univers tel un vieil homme, le nez collé à la page. »
Prieur Halmyrach (Rapport confidentiel)
(Et
l’homme créa un dieu, page 244)
Lorsque l'on est psi,
on est psi pour toujours. Lorsque l'on est dieu, on peut choisir ce que
l'on veut. Je m'incline devant vous, Révérend Prieur, devant votre bonté
et votre instruction. Les humains sont à ce point conditionnés à considérer
l'univers en termes de petits morceaux étiquetés qu'ils tendent à agir comme si
l'univers était réellement composé de ces petits morceaux. La matrice au travers de laquelle
nous percevons l'univers doit être une fonction directe de cet univers. Si nous
déformons la matrice, nous ne changeons pas l'univers ; nous ne changeons
que notre façon de le voir. Comme je l'ai dit à Stet, on peut comparer
cela à l'usage de la drogue. Si vous imposez une chose, y compris la paix, vous
aurez de plus en plus besoin de cette chose pour vous satisfaire. Avec la paix,
nous nous trouvons devant un terrible paradoxe : vous avez également besoin du
contraste de plus en plus fort de la
violence. La paix vient à ceux qui ont développé le sens nécessaire à sa
perception. Par reconnaissance envers cela, je tiendrai la promesse que je vous
ai faite : l'humanité possède un compte illimité sur la Banque du Temps. Tout
peut encore arriver. Lewis Orne au Prieur Halmyrach
P.-S. - Pourriez-vous faire
enregistrer que je souhaiterais que cette inscription figure sur ma
tombe : Il a choisi l'infini
par étapes finies. Nous appellerons notre premier fils Hal et le
laisserons trouver lui-même une plaisanterie sur la signification de son nom.
Je suis persuadé qu'Ag l'y aidera.
Amitiés,
Lewis Orne
(Et
l’homme créa un dieu, page 249-250)
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